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la loutre à roulettes
22 février 2012

les oreilles de Buster

Maria Ernestam est suédoise, vit à Stockholm, a exercé plusieurs métiers ( mannequin, chanteuse, danseuse, comédienne, journaliste… ) et vécu sans doute plusieurs vies. En effet, son roman paraît riche de toutes ces expériences.

La narratrice, Eva, tient à 56 ans un journal intime dans lequel elle revient sur son enfance et ses relations difficiles avec une mère, dont on sait très vite, qu’elle a dû la tuer pour survivre. Au rang des mères monstrueuses, celle d’Eva tient le flambeau bien droit. Maria_SandraQvist_webbEgocentrique, séductrice, égoïste, lunatique, c’est une femme qui force l’admiration à l’extérieur, mais qui détruit de l’intérieur la famille qu’elle s’est construite. Elle semble tout à fait incapable du moindre mouvement aimant pour sa fille qu’elle ne cesse de dévaloriser, mais dont elle veut l’amour exclusif. L’air rieur et le sourire aux lèvres, elle l’assassine régulièrement à coup de petites phrases blessantes : « Tu as l’air en pleine forme, Eva. Très estivale. Dire que tu as encore le bide qui ressort. On dirait qu’on l’a gonflé avec la pompe des matelas pneumatiques. », ou « Tu es vraiment une bonne à rien ! Ne me refais jamais une chose pareille ! Comment oses-tu te conduire ainsi envers moi ? », ou encore « Bébé, tu étais très difficile. Mais après, je me suis occupée de toi. Et tu me repoussais. Tu faisais la tête. Tu voulais ton père. Je ne pouvais pas deviner qu’il serait aussi raseur ! Je croyais que ça se passerait autrement. Un vrai miracle que j’ai supporté ce calvaire aussi longtemps. Pour toi, Eva. Tu ferais bien d’y réfléchir. »

Très vite, l’enfant cherche à se venger de ce désamour en punissant des êtres malfaisants, comme ce pauvre chien Buster, dont les oreilles servent de titre au roman et jouent un rôle crucial de confidentes pour la petite fille, puis la jeune femme et enfin la femme adulte qui nous raconte son histoire. Le lecteur oscille donc entre les mirages d’un passé terrifiant et la vie au calme de la diariste au milieu de sa roseraie, dans cette maison que «  sa mère détesta (… ) dès le premier jour. L’idée même de posséder une maison de campagne l’horripilait. Pour elle, les vacances étaient synonymes de soleil garanti, de restaurants chic et de boîtes de nuit, et non de journées passées entre quatre murs à contempler un orage après l’autre par la fenêtre. Elle haïssait ce climat, la pluie qui l’obligeait à porter des bottes en caoutchouc, l’oisiveté, le jardin. »

Mais même dans la paix d’une vie débarrassée du monstre, l’histoire tend à se répéter et le mari attentionné semble persister à saccager la précieuse roseraie par ses travaux. Mais Sven est-il le mari de la narratrice ? Peut-on être une bonne mère quand on a commis un matricide ? «  où finissent les mots qui traversent l’esprit sans être prononcés ? Existe-t-il un dépôt où l’on entasse les souhaits inexprimés ? Peut-on respirer une fois de trop ? » Le mal peut-il vraiment se transformer en beauté ?

Un roman haletant, émouvant et drôle… Un cocktail tonique qui permet une bonne entrée dans les vacances.

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Commentaires
M
Heureusement que tu précises qu'il est drôle, parce qu'à lire ton compte-rendu, on en douterait presque.<br /> <br /> Le thème m'intéresse.
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