The Town de Ben Affleck
Ben Affleck, vous vous souvenez ? Il a d'abord été le gars sexy qui avait coécrit le scénario de Will Hunting. Pas mal, pas mal du tout, et pas que pour sa jolie plastique... Et puis, il a enchaîné les navets, paraissant plus souvent dans la presse people ( ah ! la lunnette de toilettes incrustée de diamants qu'il avait offerte à Jennifer Lopez ! ) pour sa vie personnelle que pour son travail jusqu'à... Jusqu'à la paternité et l'excellente idée de réaliser des films, d'écrire à nouveau, de plonger en soi et de sublimer tous les démons qui déchiraient l'homme. S'en est suivi l'excellent Gone Baby Gone, puis The Town, que je viens d'aller voir et dont je suis sortie moins ravagée que par le précédent opus, mais très remuée. La problématique intime de Ben Affleck est la suivante : il a grandi dans l'un des quartiers les plus miséreux et les plus mal famés de Boston et le succès lui a sans doute donné l'impression de trahir ses origines. Comment quitter le milieu dans lequel on est né sans culpabilité ? Cette problématique n'est pas la mienne, plus celle de mon castor de mari. Pour ma part, je n'ai pas quitté mon milieu, je n'ai même jamais eu l'ambition de m'y arracher. Mais, ce sentiment d'avoir toujours derrière soi le poids de ses origines et de son passé, je le connais, je le connais même trop bien en ce moment. Et ce film a été là pour faire résonner un peu plus dans ma pauvre petite cervelle de loutre la lancinante question : Y a t'il jamais de nouveaux départs ? Peut-on se recréer soi-même ? Peut-on échapper à son passé ?
Parce que oui, le problème n'est pas tant le poids que les autres font peser sur vous, le problème c'est l'ambivalence de nos sentiments envers notre passé. A l'heure de Facebook et autres réseaux sociaux, cette problématique est plus actuelle que jamais : tout un chacun peut reprendre contact avec des gens qu'il n'aurait pas revus sans la petite toile internet. Plaisant, oui, de retrouver des gens perdus depuis longtemps. Moins plaisants parfois, les souvenirs qui remontent à la surface et font crever la fragile bulle de bonheur qui les précédait.
Je sens que ce que j'écris aujourd'hui est bien nébuleux... Qu'on se rassure : la loutre n'a tué personne, mais, le monde étant tout petit, l'une de ses bien-aimées collègues de travail est la meilleure amie d'une ancienne amie de classe préparatoire et... Et tout cela a renvoyé votre loutre à sa folle jeunesse toulousaine, avec ses passions flamboyantes et ses grands moments de mal être, de mal de vivre, à chercher sur les berges de la Garonne qui elle était, croyant que les scènes et les coups d'esclandre la rendraient vivante à elle-même. Je me trompais alors, je trébuchais sur mon petit chemin, sans rien y voir. Je l'aime ma jeunesse dégingandée, ma jeunesse cabossée, je l'aime comme on aime les petites plaies que l'on fait saigner à dessein et qu'on n'a pas envie de faire voir aux autres.
Alors, oui, à l'instar de Ben Affleck, mon passé me retient et mon passé me nourrit, comme tout un chacun. Essayons, tout comme lui, d'en faire quelque chose de beau.